jeudi 30 juin 2011

Gestations, Tove Nilsen

     Comme Nancy Huston, l'auteur, norvégienne, raconte ici sa grossesse en parallèle avec sa vie d'écrivain. 
     A ceci près que cette grossesse est la "troisième première", Tove Nilsen, comme beaucoup d'autres femmes avant elle, ayant perdu les deux précédentes. Est-ce cette souffrance suspendue au-dessus de sa tête qui lui donne plus qu’à d’autres la sensation violente d’un bonheur sacré ?
     En tout cas c'est peut être pour calmer sa peur qu'elle se plonge dans le travail, une exploration de l'histoire d'amour entre Rembrandt et son modèle féminin. Joli parallèle entre le corps de femme du modèle, qui peu à peu livre sa confiance et sa nudité au peintre, et celui de l’auteur, elle-même progressivement ouverte à  son homme et à l'être qui grandit à l’intérieur, exposée comme jamais.
     Amusant aussi de voir la femme moderne, active, fine et cérébrale laisser son corps se transformer, à l'image de celui de la femme du tableau, acceptant ces caractères sexués si marqués que partagent la peinture classique et les premiers mois d'une grossesse !
     Dans un fragile équilibre entre courage et sensibilité à fleur de peau, elle se confronte à la fascination morbide qu'exercent sur elle les petits corps de fœtus dessinés par Léonard de Vinci, allant même jusqu'à remonter jusqu'à sa dissection d'une femme enceinte.
     Passe la silhouette d’un homme, jamais nommé autrement que le Cycliste. L’évocation de leur amour est belle et elliptique.
     L'écriture est agréable, jamais lourde ni larmoyante. Voilà un livre fait de beaucoup de pudeur et d’humour, sans aucun tabou.
     Pour râler un peu : on s'étonnera au premier coup d'œil du choix plus que douteux d'un papier rose muqueuse fort peu à propos... à la décharge de Gaïa, éditeur spécialisé en littérature scandinave,  il concernait jusqu'en 2009 toute la collection, passée depuis à un crème plus neutre. Il paraît toutefois que c'est idéal pour  lire en plein soleil !

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire